Devoirs

La salle commune était exceptionnellement vide. Il fallait dire que la plupart des élèves préféraient profiter des derniers beaux jours avant d'être forcé à rester cloîtrer ici. C'était aussi ce que préférait Angélique: être seule. Une solitude qui était très difficile à trouver dans un tel environnement. Il y avait toujours quelqu'un qui venait troubler votre tranquilité.

Elle était installé à une table, profitant du silence pour travailler. Elle ouvrit plusieurs livres devant elle et sortit un parchemin ainsi que sa plume pour prendre des notes. C'était ainsi qu'elle procédait. Apprendre par coeur n'était pas utile. Sauf pour les bases. Pour le reste, il suffisait d'utiliser son cerveau. Principe auquel elle ne dérogeait jamais.

Et puis elle détestait la mentalité ambiante de l'école: s'amuser d'abord et travailler ensuite. Elle préférait déjà se débarasser des devoirs et ensuite... Se permettre de se reposer. La synthèse de ses recherches lui permettait de mener une véritable réflexion sur les sujets qu'elle étudiait et surtout de critiquer. De se rendre compte que parfois, des sorciers avaient une vision différente ou bien qu'il y avait encore des choses possibles à améliorer.

Bref la réflexion était la chose la plus importante et c'était ce à quoi son père l'avait entraîné. Avoir une réflexion critique (positive ou négative) sur ce qui l'entourait car c'était selon lui la preuve de la véritable intelligence. Principe qu'elle jugeait comme vrai. Etrangement, les jeunes filles de sang pur n'étaient pas censées montrer leur intelligence mais au contraire se montrer... Futiles... Et presque dépourvues de cerveau.

Elle regarda les murs gris qui l'entourait, réfléchissant aux deux auteurs qu'elle lisait, manifestement en désaccord. Lequel disait vrai? Les deux. Dans leur condition, les deux.

Elle notait ces approches quand la porte de la salle se fit entendre.

... Evidemment... Impossible d'être seule plus de ... Deux minutes... Enfin ça fait déjà une heure en vérité mais cette heure était trop courte...

Elle fit comme si de rien n'était et continua à travailler.

Salem tint sa plume au-dessus du parchemin, songeuse, les sourcils froncés. Un sous-main en bois posé sur ses genoux, et elle-même assise sur son lit, la jeune fille relisait avec attention chaque mot qu'elle venait de tracer. Il ne fallait rien omettre, rien négliger. Elle avait besoin d'un avis, d'un avis autre que celui des professeurs ou des élèves, à propos de ce qui venait de se passer. Un meurtre. Des plus sordides. Aucune trace de magie offensive, en apparence. L'acte s'était exécuté à l'arme blanche. Arme ancestrale. Arme de guerre. Arme moldue... Le jugement avait été impartial : la victime ne méritait pas un châtiment de sorcier. Elle ne méritait pas un châtiment digne d'un sorcier. La victime avait été indigne de la magie et son assassin venait de signer son mépris.

La jeune sorcière aux cheveux noirs de jais s'interrogeait. Elle avait glané autant d'information que possible, les gardant précieusement pour elle. Des rumeurs, des possibilités, des faits. Peut-être devrait-elle les partager avec Tom ? Et si c'était lui ? Elle ne se sentait pas convaincue... Quoiqu'il en soit, le préfet en apprendrait sans doute autant, si ce n'est plus. Salem se détendit et signa la lettre. A ses côtés, une hermine blanche comme neige était lovée dans un creux des couvertures, bien éveillée pourtant.

Salem plia le parchemin, et le scella par un sortilège. A la fenêtre, une chouette d'une blancheur similaire à l'hermine semblait attendre. Elle avait un devoir à accomplir. Rallier les îles britanniques à la Petite Bretagne. La serpentarde avait besoin de se confier à la seule personne en qui elle accordait sa confiance. Sa mère serait de bon conseil.

Une fois la lettre partie, Salem rangea ses affaires et rejoignit la salle commune, Lys sur ses talons. Elle emporta au passage un livre. Ses devoirs étaient faits, mais rien ne remplaçait des révisions régulières. La salle semblait déserte, seule une élève occupée à des travaux intellectuels était présente, jusqu'à ce que la porte s'ouvre pour laisser passer trois autres élèves. Salem ne s'en soucia pas, pas plus que les autres ne se soucièrent d'elle. Quoique l'espace d'un court instant, les trois nouveaux arrivants lui jetèrent un regard suspicieux mais guère téméraire. Elle alla s'installer confortablement sur l'un des canapé, profitant de la place libre, et reprit la lecture d'un ouvrage sur les métamorphoses. L'hermine blanche sauta sur ses genoux puis sur le dossier du canapé pour se placer près du visage de sa maîtresse.

La suspicion était partout mais cela ne troublait pas Angélique. Elle était parfaitement consciente qu'on accuserait d'office un élève de Serpentard... Il serait si simple ensuite de faire accuser... N'importe quel autre élève. Elle ignorait que Tom serait le premier soupçonné par Dumbledore évidemment. Mais si elle l'avait su, elle s'en serait réjouie. C'était qu'elle ne l'appréciait pas vraiment, ou plutôt, elle n'appréciait pas sa manière de faire et la façon dont il voulait mener leur maison... Elle détestait déjà obéir chez elle alors ce ne serait certainement pas lui qu'elle écouterait comme une parole d'évangile.

Même si une chose l'amusait bien, il fallait l'avouer. Elle riait à chaque fois qu'elle entendait ses camarades bien nés faire un éloge sur leur préfet en chef. Ne pouvaient-ils pas réfléchir ne serait-ce que deux secondes? Ne voyaient-ils pas qu'il était de rang inférieur selon leur code et donc indigne d'intérêt? Vraiment les gens étaient parfois bien ridicule!

Donc trois élèves étaient entrés et un regard noir de sa part suffit à les faire déguerpir. Des secondes années... Elle terminait juste son devoir quand une camarade vint s'installer dans la salle. Angélique jeta un coup d'oeil et reconnut Salem McQueen. Une sixième année... Une sixième année qu'elle avait reconnut comme peut être une des plus intelligentes et sympathiques des élèves de Poudlard. Une qui valait la peine de rester en vie ici en tous cas. Surtout qu'elle avait un esprit critique très tranchant mais c'était justement ce qu'appréciait Angélique. Elle ne lui avait jamais vraiment parlé auparavant. Ce n'était pas par fierté ou dédain mais simplement parce qu'elle n'en avait jamais vraiment eu l'occasion. Elle étudiait autant que Salem semblait le faire, ce qui forcément, ne leur donnait pas vraiment le temps de sociabiliser avec les autres. Elle repéra l'hermine. Etrange choix d'animal de compagnie mais devait-on s'étonner de quelque chose?

La jeune fille referma son livre et en prit un autre qu'elle ouvrit à une page particulière. C'était un livre peu recommandable emprunté à la bibliothèque quasiment ancestrale de sa famille qui traitait de théorie sur les malédictions et leur conséquence... Bien sûr, ce livre les recensait et certaines paraissaient vraiment amusantes... Elle était en train de lire une légende, celle de Morgane qui avait jeté un sort sur toute une vallée. Tous chevaliers qui y entreraient et qui ont été où sont infidèles à une femme qu'ils disaient aimer ne pouvaient plus en sortir. Bien sûr, afin de rire d'eux, elle leur avait donné tous les plaisirs possibles: musique, vin, danse, tournois... Bref, rien qui ne puisse les ennuyer. Mais dès qu'ils voulaient sortir, un grand feu qui n'étaient qu'illusion, se dressaient devant eux. Hélas, le plan de Morgane fut contrarié par Lancelot qui, apprenant la disparition de tous ces chevaliers partis à sa recherche pour certains étaient prisonniers... Grande histoire et fin plutôt heureuse d'un côté mais aussi frustrante d'un autre. Il fallait toujours s'assurer qu'une malédiction ne puisse être défaite...

Elle leva de nouveau les yeux et fut attendrie par le comportement de l'hermine. Angélique se sentait par un certain côté proche de Salem. Elle aussi avait un sang dans ses veines qui n'avaient rien de sorcier ou de moldu. Un sang venant d'une vélane...

- Ton hermine est vraiment belle...

Elle lui adressa un doux sourire sincère. C'est qu'elle ne voulait pas que Salem pense qu'elle était hypocrite... Il ne manquerait plus que ça encore!
Angélique savait très bien jouer la comédie comme tous ceux vivant ici mais elle savait aussi laisser tomber son masque de temps en temps et se montrer sincère. Bon, cela arrivait très rarement mais si elle pensait en avoir l'occasion, elle la prenait.

Si Angélique connaissait la symbolique que portait Salem à son hermine, aurait-elle changé d’avis à son sujet ? Peut-être… Quoiqu’il en soit pour saisir les images auxquelles faisait référence la jeune McQueen, il fallait connaître un bout de l’histoire de la Petite Bretagne. L’hermine y avait une place de choix. Cet animal était un emblème, et sa couleur blanche pouvait évoquer bien plus que la pureté. Salem s’attachait beaucoup à tous ces blasons et devises, très ancrés dans la culture celtique et bretonne, elle portait d’ailleurs à son cou, sous sa chemise, un pendentif explicite pour qui savait l’interpréter.

Tandis qu’Angélique faisait fuir le trio de jeunes gens, Salem poursuivait sa lecture. L’étude de la métamorphose la fascinait, autant que la magie ancienne. Elle rêvait de pouvoir un jour atteindre le rang d’Animagus, elle avait d’ailleurs fait d’importants progrès en la matière. Le chapitre sur lequel elle bûchait actuellement parlait de la maîtrise du corps d’un point de vue ésotérique, l’importance qu’il fallait accorder à la transformation d’un cheveux en plume par exemple, qui restait une expérience des plus délicates et subtiles. La jeune fille y était pourtant presque parvenue le week-end dernier.

Lys, l’hermine blanche, glissa sa tête contre celle de sa maîtresse avec douceur, ce qui tira un fin sourire sur le masque de marbre qu’était le visage de Salem. Elle passa un doigt dans le cou de sa compagne, avant d’être interpellée par l’élève studieuse. Une 7ème année. Souvent entourée d’élèves hétéroclites, autant de chaque maisons et de chaque rangs. Une personne tolérante, s’il en est. McQueen la connaissait pour avoir l’habitude elle-même de se mêler aux gens, en dispensant son savoir littéraire et artistique, même si elle se montrait bien moins… chaleureuse ?

Salem adopta une expression bien difficile à définir, comme souvent, restant distante et impartiale. La demoiselle en face d’elle semblait cordiale.

- Elle t’en remercie. Excuses-moi, tu t’appelles… ?

HJ: J'ai des origines bretonnes alors je connais très bien la symbolique de cet animal... Rolling Eyes

Tout ça correspond beaucoup à ton personnage...

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Angélique avait lu quelque chose à propos des symboles il y a longtemps. L'image qu'on associé volontiers à l'hermine était la pureté... Notamment avec cette légende d'une hermine qui a préféré se laisser tuer plutôt que de traverser la mare de boue... Souiller sa belle fourrure blanche... Au final c'était avec du sang... Chose qui interpella drôlement la jeune fille. Elle commença à réfléchir. N'était-ce pas une façon de voir les choses finalement: les sangs purs préféraient mourir plutôt que d'avoir à faire avec un sang de bourbe. Comme l'hermine, leur réaction était stupide en un sens. S'ils acceptaient de traverser la mare, ils survivraient... Angélique pensait que cette hermine finirait par retrouver son beau pelage plus tard... Enfin... Après cette délibération mentale qui ne prit que quelques secondes...

La magie animale ne l'avait jamais réellement intéressée. Du moins en surface. C'était à dire que le premier essai concluant qu'elle avait eu était des plus effrayants. Depuis ce jour elle avait décidé d'abandonner, craignant de devenir cette chose qui était censée lui ressembler au caractère...

Angélique n'était pas plus chaleureuse que Salem. Il était vrai qu'elle avait le sourire plus facile mais tout aussi neutre que possible. Elle discutait aussi de choses et d'autres. Elle refusait d'être parquée et dirigée. Pour elle, l'idéal était d'être totalement libre, sans toutes ces stupides règles qui vous régissent. Elle voulait agir comme elle voulait et quand elle voulait sans se préoccuper des conséquences désastreuses ... Elle avait tué dans cet état d'esprit et avait déjà ciblé sa nouvelle proie. Une proie de choix en plus. Stupide. Maladroit. Il était le candidat parfait. Si Lys était la compagne de Salem, le poignard qu'Angélique portait sur elle était le sien. En plus de son chat, un magnifique sacré de birmanie. Mais il restait au manoir. Par contre le poignard lui... C'était peut être ce qu'elle pouvait très simplement qualifier d'amis. En toute relativité bien sûr, puisque ce n'était qu'un objet.

Angélique eut un léger sourire face à la réponse de Salem.

- C'est elle que je remercie. Angélique Gloryfindel.

Elle prenait un soin particulier à placer son prénom avant son nom. Une façon de se démarquer de sa famille. Ce n'était plus le clan l'important, mais l'individu.

- Comment s'appelle-t-elle? J'imagine que son nom est lié à quelque chose de blanc non?

Elle eut de nouveau un sourire et posa ses yeux sur l'animal. Cette hermine était réellement magnifique. Mais elle avait d'autres plans en tête... Même si rien n'y paraissait. Il fallait dire qu'elle avait savamment brouiller les pistes depuis sa première année...

Certes, l’hermine de Salem faisait bien référence à cette légende où l’animal avait préféré la mort à la salissure de la boue. Il y avait aussi une suite à cette histoire. La duchesse Anne, une moldue de haut rang, aurait assisté à ceci et aurait demander la grâce de l’hermine. Puis elle la prit pour emblème. Kentoc’h mervel eget bezan saotret. Potius mori quam foedari. Plutôt la mort que la souillure. Ainsi Salem voyait les choses, mais pas tel que le pensait Angélique. La pire des souillures pour la jeune fille serait de s’abaisser ou de se soumettre, ce serait de devenir comme son père : une larve pitoyable. Porter la marque de l’esclavage. Voilà la souillure. Elle était de sang pur, pour autant elle préférait juger les gens sur leurs talents plutôt que sur leur rang. Mais cet aspect de sa personnalité restait caché aux yeux de tous, sauf de sa mère. Salem n’affirmait jamais rien en public, rien de tel en tout cas. Elle s’émanciperait avec le temps…

Angélique Gloryfindel. Bien. Un nom à retenir parmi tout les autres. La jeune McQueen ne se souvenait pas l’avoir vu aux petites réunions de Tom. Elle ne faisait donc pas partie du cercle fermé, et insidieux, de la clique des futurs Mangemorts. Un bon point pour elle, sans doute. Salem préférait quant à elle rester à distance réglementaire, pour mieux observer. Quant à Lys, comprenant qu’on parlait d’elle, elle agita ses moustaches en levant son museau vers Angélique. Salem répondit, gardant son perpétuel flegme.

- En effet. Elle se nomme Lys.